L’Europe orientale, cette grande méconnue…

Le testament du Tsar est une fiction, un roman. Il n’a nullement la prétention de faire preuve de pédagogie historique. Pourtant l’intrigue s’appuie sur des faits et de nombreux personnages historiques, le plus souvent authentiques. Parmi, les premiers lecteurs du roman, certains ont indiqué avoir appris des faits qu’ils ne connaissaient pas. En voici quelques uns résumés permettant au lecteur de situer les évènements. Des sources sont parfois signalées – malheureusement, elles ne sont pas toutes en langue française.

La révolution Russe et le coup d’Etat Bolchévique (Mars 1917 – Octobre 1917)

En février 1917, la Russie alliée notamment de la France et de l’Angleterre est en guerre contre l’Allemagne et l’Autriche Hongrie depuis 3 ans. Elle a subi des pertes humaines considérables. L’économie est exsangue, un hiver rude débouche sur une disette. Les manifestations et les grèves vont aboutir à l’abdication du Tsar quelques semaines plus tard. Cette abdication est pratiquement dictée sous la pression de l’état-major russe qui doit faire face à de nombreuses désertions. C’est la fin de la monarchie. Les gouvernements provisoires se succèdent. En octobre les Bolchéviques lancent une insurrection. Une assemblée constituante est élue en décembre mais les Bolchéviques bien que minoritaires la dissolvent et instaurent la dictature des Soviets.

Le Traité de Brest Litovsk (Mars 1918)

Contre l’avis de son propre camp, Lénine chef du parti bolchévique n’a eu de cesse de soutenir la signature d’une paix séparée avec l’Allemagne. Cette paix séparée est ressentie comme une véritable trahison par les alliés. Lénine qui était réfugié en Suisse a bénéficié du soutien de l’état-major allemand pour rejoindre la Russie au printemps 1917 et participer à la révolution, excitée en sous-main par l’ennemi allemand qui finalement atteint ses objectifs : le 15 décembre un armistice est signé entre l’Allemagne et le gouvernement bolchévique qui va aboutir au traité de Brest-Livotsk du 3 mars 1918. La Russie perd des territoires considérables dont la Finlande et l’Ukraine. Cette paix séparée va être déterminante pour engager les Français, les Anglais et les Américains à soutenir les armées blanches contre les Bolchéviques durant les deux années que vont durer la guerre civile en Russie.

La guerre civile russe (1917 – 1920)

Elle n’oppose pas que des tsaristes contre les bolchéviques. Après une très brève hésitation, dans un souci d’apaisement les frères du Tsar, les grand-ducs Nicolas et Michel renonceront à la couronne. Contrairement à l’impression que peut donner le roman - et aussi les commentateurs divers - les armées blanches qui combattent les Bolchéviques ne visent pas au rétablissement de la monarchie. Elles combattent la dictature Bolchévique pour leur avoir confisqué la révolution. Les opposants aux Bolchéviques ne sont pas unis. Il existe plusieurs fronts et plusieurs courants politiques. Sans compter des partisans de revendications territoriales à l’intérieur de la Russie. Trois fronts géographiques principaux s’installent en Russie : à l’Est en Sibérie commandé par l’Amiral Koltchak qui deviendra chef du gouvernement provisoire ; au Sud Ouest commandé par le général Denikine et enfin, à l’Ouest, la Pologne et la Tchécslovaquie se battent contre la Russie Bolchévique. Le général Wrangel deviendra le chef unique des armées blanches après l’assassinat de Koltchak. La guerre civile en Russie donnera lieu à des exactions et des famines d’une violence inouïe. La victoire des Bolchéviques tient au génie tactique de Léon Trotski chef des armées rouges et surtout à l’impatience des anglais dont les intérêts imposent la reprise des échanges et du commerce maritime. L’abandon progressif du soutien occidental aux armées blanches va leur être fatal. La Russie soviétique ne sera finalement reconnue diplomatiquement par les principaux pays qu’en 1924.

L’immigration russe consécutive à la guerre civile (1920 – 1925)

Selon les estimations, entre 1 et 2 millions de russes « blancs » quittent la Russie à l’occasion de la guerre civile. La France leur apportera une aide déterminante. Au lendemain de la grande guerre elle voit en eux les frères d’armes de la Champagne et de la Macédoine auxquels le Maréchal Joffre rendra un vibrant hommage. Même si l’on compte parmi eux beaucoup de soldats et d’officiers restés fidèles à l’ancienne armée impériale, il est inexact de prétendre qu’ils sont « Tsaristes ». Il y a parmi eux des Menchéviques (« socialistes »), des libéraux et ils seront même rejoints plus tard par d’anciens Trotskistes une fois que ce dernier sera exilé puis assassiné sur ordre de Staline. Au sein de cette immigration existe des organisations qui tenteront de continuer la lutte contre la dictature Stalinienne depuis leur exil. On compte parmi elles notamment l’Union Générale des Combattants Russes. Les généraux Wrangel, Koutiépov et Miller qui la dirigent successivement seront tous assassinés par les services secrets soviétiques dans des conditions obscures et atroces. Au delà des traits pittoresques qui les présentent sous l’aspect de « princes » devenus chauffeurs de taxi, les "Ruskoff" sont des exilés proscrits dont les yeux restent tournés vers leur patrie.

Les Traités de paix à la fin de la première guerre mondiale (1918 – 1923)

Pendant la guerre civile Russe, à partir du 11 novembre 1918, (fin de la première guerre mondiale) en France, se déroulent les négociations des traités de paix. L’idéalisme du président des Etats-Unis dicte un règlement qui ne sera pas ratifié par son propre congrès (les onze points du président Wilson). Les diplomates des pays vainqueurs doivent compter avec des discordances importantes entre leurs gouvernements respectifs. La carte des territoires d’Europe centrale et orientale est découpée. Des états sont créés de toute pièce sans tenir compte de l’identité culturelle et linguistique des populations. A titre d’exemple, la Hongrie installée dans le bassin des Carpates depuis 1000 ans perd les deux tiers de son territoire (Imaginons la France du XXe siècle brutalement réduite à celle de Philippe auguste). Une partie de la Prusse est détachée de l’Allemagne séparée par un territoire polonais etc.… Le recouvrement du montant des dommages de guerre mis à la charge des vaincus est complètement irréaliste.

L’impossible reconstruction entre les deux guerres (1918 – 1938)

L’ineptie politique du règlement de la première guerre mondiale a été notamment soulignée par l’analyse prémonitoire qu’en avait faite un célèbre historien Français peu après sa concrétisation (Jacques Bainville : « Les conséquences politiques de la paix »). L’armistice du 11 novembre 1918 va conduire à une insurrection quasi générale dans la totalité des pays vaincus au delà du Rhin de 1918 à 1920. Après avoir consenti tant de pertes humaines durant la guerre, les citoyens se sentent trahis par leur gouvernement. Des insurrections et l’installation d’éphémères pouvoirs bolchéviques vont voir le jour, déclenchant des guerres civiles meurtrières. Sous la conduite implacable du ministre socialiste Gustave Noske la révolte bolchévique Spartakiste est écrasée en Allemagne. En Pologne et en Hongrie l’armée Française intervient. Les victimes de ces épisodes révolutionnaires surajoutées à celles de la grande guerre vont durablement alimenter le ressentiment des populations. Les charges financières exorbitantes des dommages de guerre alliées à la fin de l’union douanière qui liait les pays d’Europe centrale obéreront la reprise économique. L’ensemble de ces facteurs vont définitivement exacerber le ressentiment des populations Germaniques. Elles seront facilement séduites par la démagogie Hitlérienne qui joue habilement sur les maladresses et les différents des vainqueurs et l’impuissance économique de la république de Weimar. L’ascension Hitlérienne sera facilitée en outre dans un premier temps par un appui financier considérable d’industriels et de banquiers qui voient dans le dictateur un gage de stabilité de la société et un opposant au bolchévisme. Sur les territoires de l’ancienne Hongrie historique, les nouveaux Etats de la « petite entente » (Tchécoslovaquie, Roumanie, Yougoslavie) tentent d’imposer la suppression de la langue hongroise aux populations Magyar provoquant un irrédentisme chronique qui subsiste aujourd’hui encore. En Hongrie, après une révolte éphémère spartakiste, l’amiral Horthy devient chef d’Etat en qualité de régent d’une monarchie constitutionnelle.

Les « génocides » Stalinien (1932 – 1952)

Après la mort de Lénine (21 janvier 1924), Staline va systématiquement éliminer tous les anciens compagnons de route Bolchéviques et instaurer une dictature dont l’habilité consiste à exercer un pouvoir personnel sous le masque de prétendues décisions collégiales. Une utilisation inédite d’une propagande massive vantant une prétendue réussite de la révolution sert en réalité à bâtir un culte de la personnalité du tyran et cacher une politique d’extermination. Jusqu’à sa mort en 1953, le dictateur va utiliser l’assassinat ou la déportation de catégories entières de populations, installant son pouvoir sur la terreur (paysans, officiers, populations régionales, médecins etc.…). Les historiens reconnaissent désormais unanimement ces crimes mais sont partagés sur la définition exacte de leurs modalités et la portée de leur conséquence. La raison principale de cette discorde tient essentiellement au caractère secret de la répression soviétique, une habile propagande et une ouverture très tardive des archives dans les années 1990 (pour une période brève car elles sont à nouveau inaccessibles…). Par ailleurs, la Russie soviétique alliée de circonstance des anglo-américains contre l’Allemagne nazi durant la seconde partie de la seconde guerre mondiale a été ménagée par l’Occident, l’inscrivant dans l’épopée du combat de la « liberté » contre le Nazisme.

Le pacte germano-soviétique (23 août 1939)

 

Le 23 août 1939, Hitler et Staline signent un traité visant à engager la guerre et à se partager la Pologne, les pays Baltes, la Finlande, la Bessarabie. Pour la Russie, il ne s’agit pas d’un traité défensif mais d’un partage avec l’Allemagne permettant la reconquête partielle des territoires perdus à l’occasion de leur précédente trahison à l’égard de l’Occident au traité de Brest Litovsk. La France et l’Angleterre sont contraintes d’engager la guerre contre l’Allemagne sans espoir d’un second front secourable à l’Est. Ce pacte sera déterminant pour permettre à l’Allemagne nazi de mobiliser toutes ses forces et triompher contre la France en 1940 dans une guerre éclair. Cette alliance entre les Nazis et les Soviétiques va accélérer la mise sous tutelle de quasiment toute l’Europe sous le joug des dictatures totalitaires rouge et brune en 1940. La gestapo et la NKVD collaborent dans les pays occupés pour se livrer respectivement les opposants politiques. Exemples emblématiques de cette coopération criminelle : La Russie ferme les yeux sur la création du ghetto juif à Varsovie et procède au massacre systématique des officiers Polonais dans la forêt de Katyn. L’histoire ne retient pas les effets concrets de cette terrible alliance contre les militants communistes sincères et idéalistes à l’Ouest qui furent parfois livrés aux autorités emprisonnés ou assassinés sur le fondement de renseignement délivrés à Berlin par Moscou.

Les succès sidérants des conquêtes des puissances totalitaires (1940)

Aux termes des accords de Munich en 1938, l’annexion de la Tchécoslovaquie par Hitler est acceptée par la France et l’Angleterre. Cet abandon est un terrible désaveu diplomatique puisque la France et l’Angleterre avaient revendiqué et imposé la paternité de cet état après la première guerre mondiale au traité de Saint Germain en Laye. Un an plus tard, quelques jours après avoir signé le pacte germano-soviétique c’est au tour de la Pologne d’être envahie par les armées allemandes et russes. Cette fois la France et l’Angleterre déclarent la guerre à l’Allemagne, mais elles ne parviennent pas à se mettre d’accord sur une stratégie commune. Elles campent sur leur frontière durant de long mois. Ce délai permettra l’écrasement de la Pologne, l’annexion de l’Autriche et des pays baltes et la mise sous tutelle de pratiquement toute l’Europe sous le joug des puissances totalitaires. L‘Allemagne Hitlérienne profite à fond du pacte germano-soviétique en conquérant pratiquement toute l’Europe avec son allié Italien. La Russie en revanche n’arrive pas à remplir les objectifs qu’elle s’était assignée. La Finlande résiste à l’invasion russe qui se soldera au bout de quelque mois par un arrêt des combats concrétisé par un traité à Moscou le 12 février 1940. En revanche, une fois atteint ses objectifs en Europe centrale, l’Allemagne concentre toutes ses forces à l’Ouest et écrase la France en quelques semaines. L’Europe libérale est désormais réduite aux îles Britanniques. Au cœur du chaudron européen à l’instar du Portugal et de l’Espagne, la Hongrie conserve une indépendance au prix de compromissions avec l’Allemagne qui lui évitent dans un premier temps d’être occupée.

L’invasion de la Russie par l’Allemagne (1941)

L’Angleterre résiste aux préparatifs d’une invasion allemande (opération Lion de mer). Malgré leur infériorité, les Anglais infligent de très grosses pertes à l’aviation allemande grâce notamment à l’emploi inédit et secret du radar qui leur permet de prévenir les attaques. Hitler estimant que la Russie est une proie plus facile abandonne l’opération Lion de mer. Au plan politique il justifie la guerre contre la Russie par un besoin d’espace vital. Au plan militaire les allemands ont observé la faiblesse de l’armée soviétique à l’occasion de la tentative désastreuse de conquête de la Finlande. L’armée rouge est totalement désorganisée du fait notamment de la décapitation de ses cadres par Staline qui a ordonné des purges successives innombrables dans les années 1930. Initialement prévue au printemps, l’opération Barbarossa déclenchée en juillet 1941 surprend totalement Staline qui ne croit pas à la trahison d’Hitler alors même qu’il en est prévenu par ses services. La conquête de la Russie durant l’automne est stupéfiante. Les allemands font des millions de prisonniers. Un excès de prudence de l’état-major allemand suivi d’un hiver rigoureux « préserveront » in extremis Staline et stopperont l’avancée allemande.

L’entrée en guerre des U.S.A et le prêt bail à la Russie (1941)

Pourtant alliée de la France et des Anglais, l’Amérique ne rentre pas en guerre en 1939. Le peuple américain qui a perdu en une année plus de cent mille hommes en Europe durant la première guerre mondiale et qui a dû subir une terrible crise économique en 1929 ne voit aucun intérêt à retourner se battre pour l’Europe. Le président Roosevelt le sait et limite l’aide américaine aux appels angoissés de Churchill à un soutien économique. L’attaque japonaise à Pearl Harbour en décembre 1941 va renverser l’opinion et entrainer l’Amérique dans la guerre. Pour l’Angleterre l’ouverture d’un front russe et l’attaque japonaise contre l’Amérique sont des nouvelles inespérées. Elle a tout à gagner d’un appui militaire de son puissant allié. Churchill convainc Roosevelt d’aider la Russie pour continuer à mobiliser les forces Allemandes sur le front de l’Est. Le prêt bail américain à la Russie participera selon les études à hauteur de 17 à 25% de l’effort de guerre soviétique.

La victoire de l’union soviétique (1945)

A Yalta en Russie se tient en février 1945 la conférence qui regroupe les alliés américains, russe et anglais. Elle est censée régler l’après guerre très prochaine en définissant une stratégie commune. A postériori, il lui est souvent attribué la paternité d’un partage du monde entre les USA et la Russie, l’abandon des pays d’Europe de l’Est au joug soviétique etc.… En réalité, rien n’y a été réglé. S’il est vrai que le président Roosevelt y apparaît diminué par la maladie, le traité se limite à l’approbation de principes (qui ne seront pas respectés par les soviétiques). Les américains ont le souci légitime de préoccupations militaires et ne sont pas méfiants des objectifs politiques à long terme de Staline malgré les alarmes de leur ambassadeur à Moscou. Peu après la fin de la guerre en Europe (8 mai 1945) la conférence de Potsdam (Juillet-Août 1945) entérine les principes de Yalta et laisse croire que les pays d’Europe de l’Est occupés militairement par les troupes soviétiques choisiront démocratiquement leur régime… Il n’en a rien été. La Russie satellisera tous les territoires occupés militairement à l’exclusion de l’Autriche qu’elle consentira à ne quitter qu’en 1955 grâce à l’engagement du traité de Moscou de 1943 antérieur à Yalta qui avait entériné le principe d’indépendance de l’Autriche. La Russie revendique constamment son premier rang à la victoire à l’aune du nombre de ses victimes. Elle oublie d’y soustraire celles dont elle est le premier responsable. Elle masque également constamment que la résistance de la Russie contre l’Allemagne a été très substantiellement soutenue par l’aide économique américaine. Enfin, la controverse relative au traité de Yalta tient également au fait qu’ultérieurement, il fut découvert que certains collaborateurs de Roosevelt avaient travaillé pour le compte de l’Union Soviétique.

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